La Reine & Le Chasseur

Draen remit en place son chapeau et retira la neige qui collait à sa cape. D’un coup d’œil, il avisa le lion des neiges mort qui avait essayé de le surprendre. Maudite bête, un peu plus et il aurait pu faire rater toute sa petite préparation. Reprenant sa lunette pour observer au loin et ne rien apercevoir, il fit pour la troisième fois un inventaire de ce qu’il avait pris sur lui : Trishya, sa compagne de toujours, deux dagues, une lame longue, une chaine et quatre pistolets. Une rafale de vent le ramena à la raison. Bien que sous ses épais vêtements, il ne craignait pas la température basse de la région, rien n’arrêtait les bourrasques sur ces plaines blanches et on pouvait facilement se retrouver à terre.

S’allongeant finalement sur le doux tapis de neige, il reprit sa lunette pour observer l’horizon et avisa enfin une forme à cheval qui se dirigeait vers lui. Un coup d’œil sur ses arrières lui confirma que l’arrivant voulait bel et bien emprunter le tunnel qui permettait d’entrer dans le château d’Ogottaï. Il prit Trishya en main et mit sa proie en joue. Finalement, le chasseur sortit un petit morceau de tissu, essuya ses verres et l’outil de visée de son fusil de précision et calma sa respiration.

Onyx, voilà le nom de sa cible. Un mage, réputé pour avoir une tête pouvant rapporter beaucoup d’or. Draen avait sauté sur l’occasion dès qu’il avait entendu l’un de ses informateurs lui parler d’une rumeur comme quoi le sorcier aurait été vu dans le coin. Le prénom chatouillait la mémoire de l’humain mais il n’arrivait pas à remettre sur ce nom une action ou un crime connu.

Sa proie fut enfin à portée, moins d’une centaine de mètres. Il était peu probable qu’avec le temps, l’étranger puisse apercevoir le tireur embusqué qui allait prendre sa vie, commençant à appuyer sur la détente, Draen fut brusquement arrêté par une voix dans sa tête :

*Assassin !*

Un peu surpris, il perdit sa visée et secoua la tête. Il ne pouvait pas tirer sur un inconnu sans être sûr qu’il s’agissait bien d’Onyx. Cette personne pouvait très bien être un voyageur, un chasseur de trésor ou un curieux. Se levant finalement lorsque l’arrivant ne fut plus qu'à vingt mètres pour lui permettre de le voir, Draen lança à voix haute après l'avoir mit en joue, sur un ton grave déformé par son masque :

« Halte, levez vos mains et déclinez votre identité. »

Elle tourbillonnait dans une danse énigmatique, suavement et délicatement, une pétale blanche, un flocon de neige pour échouer avec une grâce nommée au delà d'un châle immaculé. Dans sa solitude naquit depuis peu de temps, ses compagnonnes ainsi appelée "flocon de neige" chutèrent proche d'elle, étreignant leurs cinq bras les unes aux autres toujours dans une grâce sensuelle.
Les Pas à quatre temps soulignaient un déplacement monotone et lent, moins sublime mais tout aussi grâcieux dans la musique qui se libérait de la douce cadence de ce noble animal.Cette Symphonie accompagnait doucement la descente rapide de flocons évanescent.

" Avance Bourrique! "

Sa voix rauque et masculine fut immédiatement recouverte par une autre, ni gaie ni courtoise. Le danger résidait là: de cet inconnu aux vêtements flottants dans les flocons sournois, leur danse s'était accéléré entre-temps aiguisant l'atmosphère plus qu'elle n'en était déjà.

" Epona, cheval de trait Nordique de Bâal, il a eu un peu peur en vous voyant mais ça va pour lui! "

" Vous de devez pas être de la région vous, je ne me trompe? Héroclytes No Soucis, je proviens de Bâal à destination du Château d'Ogottaï... et vous? qui attendez vous donc? Pourquoi être caché sous des tonnes de fringues même pas à la mode? "
* Hérocl.. mais j'ai trouvé ça ou moi....?!! *

L’étranger s’était encore avancer un peu, à priori pas hostile, contrairement à Draen dont le canon de l’arme n’avait pas quitté sa cible. Le chasseur de prime n’aimait pas vraiment les chevaux, il préférait voyager à pied, aussi quand on lui donna le nom de la bête, il ne le releva même pas. Il nota en revanche la provenance de Bâal qui était surement aussi celle du cavalier même si sous son ample manteau, on ne pouvait pas distinguer ses vêtements. Onyx arrivait justement de ce pays, peut-être qu’il aurait dû tirer plus tôt…

Il nota le liquide qui coula de la manche de l’arrivant et pensa qu’il saignait. Préférant ne pas le quitter des yeux, il ne remarqua pas que les gouttes formaient un tracé bien précis. Draen resta sur ses gardes lorsqu’il posa un objet sur la selle et se détendit finalement quand il leva les mains.

« J’attends un compagnon avec qui je devais explorer le château et comme je ne suis pas ici chez moi je me méfie de tous les étrangers, désolé. »

L’insinuation sur sa tenue ne l'avait même pas touché, il n'était nullement atteint par ce genre de commentaire. Se souvenant du sang, il demanda :

« Vous êtes blessé ? Vous avez perdu un peu de sang il y a quelques secondes. »

Il préféra garder Trishya en main mais cessa de tenir l’étranger en joue pour qu’il se sente moins oppressé. Draen avait pris soin de bien retenir son geste pour, au cas où, tirer à peu de choses près là où se trouvait son canon sans avoir besoin de viser à nouveau.

« Et vous, qu’est-ce que vous venez faire dans ce coin plutôt inhospitalier ? »

En vérité, le chasseur de prime ne faisait pas du tout confiance à Héroclytes. Mentir sur son nom était facile mais après tout, pourquoi Onyx aurait-il mentit sans savoir que le tireur voulait en fait sa tête. Dans le doute, il préférait quand même rester méfiant mais pour l’instant, rien ne le poussait à ouvrir le feu. Avisant la carcasse du lion à quelques mètres de lui, il nota qu’en cas de pépin, il aurait au moins de quoi se battre à proximité.

" Non je ne suis pas blessé, mon pot d’encre a volé lorsque vous m’avez mis en joute... il n’est pas poli d’aborder les gens de cette manière qui sait sur qui vous pourriez tomber... "

" je viens voir de la famille. Bon eh bien, avant qu’une Tempête ne se lève, j’irai me réfugier la-bas si j’étais vous. Bon voyage messire! "

*De la famille hein…*
Draen garda pour lui ses commentaires mais le château n’était pas réputé pour être habité. Peut-être qu’il le désignait uniquement pour informer qu’il comptait s’y abriter ? Toujours est-il qu’il venait d’inviter sans peut être sans rendre compte le chasseur de prime à le suivre puisque les deux allaient donc entrer dans la bâtisse sous-marine.

Un violent coup de vent balaya les lieux, encourageant en effet les deux hommes à entrer. Le tireur fut subitement transis, pas par le froid, non… Il venait de voir le visage de l’étranger, ces marques… Tout lui revenait à présent, comment avait-il pu rater quelque chose d’aussi évident !? Onyx, c’était bien sûr le fameux mage de Jamyr qui avait à lui tenu tête à deux cités, seul, et les avait même pliées à sa volonté. Son interlocuteur avait donc bel et bien mentit sur son identité mais c’était le cadet des soucis du chasseur de prime. Il était bien heureux d’avoir lui aussi masqué la vrai raison de sa venue. S’il avait dit traquer le mage, celui-ci l’aurait surement tué et sans forcer outre mesure…

Lui qui pourtant, n’était vraiment pas impressionnable, se sentait soudain petit. Plusieurs questions assaillaient son esprit troublé, se bousculant l’une l’autre pour avoir la priorité. Que faisait une telle personnalité ici ? Qui était celui qui avait mis un contrat sur sa tête ? Onyx n’avait pourtant pas été vu depuis des lustres… Que diable pouvait-il bien faire dans un coin aussi perdu ?

La bouche de Draen prononça les mots en même temps qu’il les pensa :

« Soit, je vais suivre votre conseil, toutes mes excuses pour l’agression. »

Sans paraitre trop soumis d’un coup, le chasseur préféra faire oublier son approche un peu brutale en essayant de mettre plus à l’aise le sorcier. La curiosité avait pris le dessus, on ne rencontrait pas toujours quelqu’un d’aussi connu et il avait peu de chance de pouvoir le vaincre en combat singulier, alors autant ne pas avoir fait le déplacement pour rien !

« Si vous le permettez, traversons le tunnel ensemble, puisque nous allons tous les deux vers Ogottaï. Je serais discret, vous ne remarquerez même pas que je suis là et je ne vous dérangerais pas. »

Il venait d’implicitement demander la permission à Onyx de le suivre, il espérait maintenant que ce dernier accepte ou dans le pire des cas, se sente obliger de le faire. Ne sachant que le chasseur avait découvert sa véritable identité, il aurait paru étrange de refuser une compagnie pour juste quelques heures après avoir traversé un désert de glace.

" Je ne pense pas avoir besoin d’une quelconque personne. "

"Et je n’ai nullement besoin d’avoir un mort sur la conscience, vous resterez dans mon ombre et je vous suggère de ne plus pointer cette chose vers moi. Venez, il est temps de partir."

" Dites moi mon brave, de quel lieu provenez vous? Vous ne semblez pas être habitué a ce genre de climat... "

*Bingo !*

Onyx avait accepté son offre et le chasseur s’autorisa un sourire caché par son masque. D’après ce que disait le mage, il pouvait y avoir des risques, puisque ce dernier lui demandait de rester discret. Le fait qu’il venait voir de la famille s’en trouvait très controversé mais il était compréhensible qu’il ne dise pas la vérité à un parfait inconnu, surtout vu son statut important. Il fit ce qu’on lui avait demandé et emboita le pas de l’asvar, silencieux, rangeant son arme dans son dos et rentrant ses mains dans son manteau, comme pour les réchauffer. En réalité, il avait saisi deux pistolets à un coup. Draen ne craignait pas vraiment que le sorcier le trahisse pour l’instant mais puisque les lieux étaient plutôt hostiles, autant être prêt à se battre rapidement.

Ne connaissant rien aux chevaux, il crut qu’Onyx avait volontairement stoppé la bête pour pouvoir lui poser sa question. Décidant que dire la vérité ne lui couterait rien, il répondit :

« Galaadjiir, l’île flottante. Il est vrai que je parcours rarement des contrées aussi froides. »

Il regarda autour de lui la plaine gelée balayée par le vent. Sa tenue lui épargnait certes de souffrir du froid mais il ne put réprimer un frisson. Son instinct le mettait en garde contre un quelconque danger mais pour l’instant, il ne voyait rien. Le chasseur avait cependant apprit à faire confiance à ses impressions et alors que le mage lançait à nouveau sa monture, il lança :

« Je sens le danger et faites-moi confiance, j’ai l’instinct d’une bête sauvage… »

Puis il reprit à son tour la marche, entrant dans le tunnel avec le sorcier et l’animal.

" C’est terriblement excitant, n’est-ce pas? "

" Je n’en attendait pas moins de dix paires de couilles pour défendre ce simple tunnel ... Après tout, ils n’y en avaient pas moins de milles pour Danalieth! COMMMEE OOONNNN!!!"

HRP:

Draen s’était lancé à la suite d’Onyx dans le tunnel mais sa mauvaise impression se faisait de plus en plus oppressante. Il avait prévenu le mage et ne préférait pas insister, celui-ci devait savoir se défendre, vu sa réputation… Le sorcier s’arrêta d’un coup et le chasseur manqua de lui rentrer dedans de plein fouet. Curieusement, il rangea les vêtements qui le masquaient avec minutie. Certes, il faisait nettement moins froid ici mais pourquoi soudainement décider de ne plus se cacher ? Sa tenue en dessous était en plus très peu discrète, puisqu’il était ni plus ni moins dans sa tenue de Roi…

Quand il repartit, Draen lui laissa un bon mètre d’avance pour éviter que la fois suivante il le percute vraiment. Ils marchèrent encore un peu et l’impression de danger que ressentait l’assassin se renforça. Il tenta de prévenir celui qu’il suivait avant de se rendre compte que le concerné avait pris une dizaine de mètre d’avance sur lui en accélérant, alors que le chasseur scrutait les alentours avec suspicion. Regardant le dos du sorcier, il vit quelqu’un sortir des ombres et se jeter sur le mage qui lui attrapa le bras pour lui faire faire un vol plané, le mettant hors d’état de nuire.

Une bonne dizaine de guerriers sortir d’un peu partout pour s’occuper du Roi, alors que quatre seulement firent face au chasseur de prime. Il n’était clairement pas l’objectif, ils n’étaient même pas agressifs, comme s’ils voulaient juste le tenir loin du mage pendant que leurs alliés s’en occupaient.

Dans tous les cas, il ne pouvait pas vraiment aider Onyx alors autant au moins essayé de se débarrasser de ceux-là. Sortant les deux armes à feu dont il tenait toujours la crosse, il alluma à bout portant deux des mercenaires qui s’écroulèrent en geignant. Les armes n’étant qu’à un coup, il les jeta vers le visage des deux restants, en atteignant un alors que l’autre la dévia. Chargeant celui qui n’était pas sonné, il dégaina deux dagues et agressa par diverses feintes son adversaire, jusqu’à lui tourner volontairement le dos, exécutant un tour sur lui-même. La cape de Draen vola autour de lui et alors que son adversaire allait profiter de l’occasion pour l’attaquer dans le dos, les petites lames cousues à l’extrémité de la cape lui déchirèrent le visage, offrant ensuite l’occasion au chasseur de l’achever d’un coup de dague précis en direction de la gorge.

Celui qui avait reçu le pistolet retrouva ses esprits, empli de rage à la découverte de son nez brisé. Rangeant ses armes, l’assassin, repoussa du plat de la main la lame lancée à l’aveugle contre son torse, s’approcha à quelques centimètres de son adversaire pour lui asséner trois coups de poings bien placés qui le laissèrent hors combat. Au moins en cas de besoin, il en resterait un en vie à qui poser des questions… En ayant fini avec ses agresseurs, il chercha Onyx du regard.

" Allez ma belle, il t’en reste deux... courage! "

" Kâah.... Mi!* "

Spoiler:

A peine s’était-il tourné vers le mage que ce dernier avait filé dans le tunnel comme s’il avait le diable à ses trousses. Naturellement, les deux survivants le prirent en chasse, rien d’anormal et pourtant quelque chose intriguait Draen au plus haut point. Soit il avait surestimé Onyx, soit il avait fait erreur… Il était peu probable que quelqu’un ayant tenu tête à plus d’un millier d’homme puisse être mit en difficulté par dix mercenaires.

*Après tout il existe surement plusieurs mages de Jamyr… Enfin je crois…*

Se tournant vers celui qu’il avait laissé en vie volontairement, le chasseur lui asséna une violente gifle pour le faire revenir à lui et prit un ton menaçant qui collait parfaitement avec sa tenue angoissante.

« Parle, qui êtes-vous, qu’est-ce que vous vouliez faire et qui est ce mage ? »

« Va te faire… Foutre… »

Serrant les dents, l’assassin frappa en pleine zone sensible de son adversaire, faisant gémir celui-ci qui ne semblait toujours pas en bonnes dispositions. Posant sa main sur son cœur, ce dernier murmura :

« Frappe moi autant que tu voudras, je ne dirais rien. »

Hochant la tête et se relevant, Draen lui flanqua un coup de botte en pleine tempe pour le sonner, avant d’ouvrir la tunique du concerné et fouiller dans ses poches intérieures. Ce dernier n’était pas un simple mercenaire, sinon il aurait répondu sous la menace, c’était une sorte de fanatique ou d’homme très fidèle à son maitre. Ce dernier avait mis une main sur sa poitrine en pensant rendre bientôt l’âme, touchant surement quelque chose à laquelle il tenait. Saisissant une enveloppe cachetée et un pendentif, le chasseur les arracha à son propriétaire sans un remord avant de courir rejoindre le sorcier et ses deux poursuivants.

Il avait fait une bonne partie du trajet lorsqu’un coup de feu résonna. Le mage n’avait pas d’arme, ce n’était pas bon signe… Maintenant que l’assassin avait plutôt tendance à croire que l’étranger était un mage de Jamyr autre qu’Onyx il n’avait plus de raison de le tuer et allait si possible essayer de lui porter assistance.

Quelques secondes après, une puissante explosion résonna dans le tunnel et un corps carbonisé vint s’écraser auprès de Draen qui continua sa course pour éviter l’immonde odeur que le cadavre n’allait pas tarder à produire.

La vue du mage le conforta dans sa nouvelle idée que le sorcier devant lui n’était pas sa cible. Ce dernier était dans un bien piteux état, blessé gravement et essoufflé. Commençant lui-même à avoir le souffle court, le chasseur ralentit un peu et interrogea le jeteur de sort :

« Ça va aller ? Je peux essayer de faire un bandage correct avec votre tunique déchirée si vous le voulez bien mais je n’ai malheureusement rien d’autre... Votre famille vous attend alors hors de question que vous creviez dans ce tunnel moisi. »

" Taisez-vous! Jamais, Jamais je ne pourrais ainsi me faire tuer! "

" Ce qui aurait éventuellement pu m’aider aurait été un pinceau ou une plume. Êtes vous également blessé? "

" Donnez moi votre main que je vous soigne..."

" Houla, qu’est-ce qu’ils nous ont encore inventés la...?"

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